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Homélie du dimanche 20 février 2022

« Ce que dieu fait pour nous, faite le aussi pour les autres. Mais dans quelle mesure ? »

L’évangile de ce Dimanche nous fait entendre la suite du « Discours dans la plaine » qui correspond chez Luc au « Discours sur la montage » de Matthieu.

Après la proclamation des béatitudes et lamentations, Jésus invite maintenant ses auditeurs (« Je vous le dis, à vous qui m’écoutez », v.27) aux attitudes fondamentales qui font d’eux d’authentiques enfants du Père (v. 35, au centre du discours).

Ses injonctions sont exigeantes et déconcertantes, et c’est pourquoi, à la fin du discours revient l’invitation à l’écoute :

« Tout homme qui vient à moi, qui entend mes paroles et qui les mets en pratique construit sa maison sur le roc » (parabole des v.47-49).

Cette insistance rappelle le « Sh’ma Israël », leitmotiv du Deutéronome. Il s’agit ici aussi d’écouter la Loi divine.

Et de « Roc » : oui que nous faut-il donc écouter, un peu plus loin dans le texte il parle de la paille et poudre dans notre oeil, dans ce texte et au-delà et mettre en pratique si nous voulons être disciples de Jésus et bâtir notre vie sur Lui, le Roc ?

Un appel à aimer au-delà des limites du bon sens, de la sensibilité naturelle et même de la justice…

L’essentiel est dit en trois mots : « Aimez vos ennemis » (v.27 et 35), impératif paradoxal dont Jésus explicite le contenu concret et la raison profonde.

Selon Jésus, Aimer l’ennemi, c’est lui faire du bien, le bénir et prier pour lui…

Voilà pourquoi, Aimer en actes, c’est prêter et donner généreusement, même son nécessaire (la tunique), en prenant le risque de ne rien recevoir en retour.

Et Jésus nous avertit : entretenir les relations amicales, être bienveillant, sans juger et savoir réparer une relation, oui, nous le savons bien pas besoin d’être chrétien pour cela. « Tout ce qui est humain n’est pas chrétien mais ce qui est chrétien devrait être humain… »

Il nous faut avouer que la plupart du temps, nous restons dans notre « zone relationnelle de confort », où l’on se trouve bien, en sécurité par rapport à l’Autre, le différent donc le potentiellement dangereux !!!

Au fond, on s’aime soi-même en restant là, mais on s’aime superficiellement.

En effet, les gens qui ne nous plaisent pas sont souvent ceux qui reflètent la part obscure de nous-mêmes.

Jésus nous invite à choisir une attitude de bienveillance et de compassion l’autre et pour notre ennemi. Lui vouloir du bien, prier pour lui est donc la condition indispensable de notre intégration humaine et croissance spirituelle.

Pour devenir ce que nous sommes en vérité, « images de Dieu », il nous faut aimer comme le Père aime : sans mesure, car Lui est bon et miséricordieux pour les ingrats et les méchants.

Vivre ainsi, c’est vivre de la grâce donnée (le mot charis, traduit par « reconnaissance », exprime le plaisir d’être, la satisfaction d’exister pleinement comme harmonie avec le dehors et ce mot revient trois fois en 32-34) et cela en témoignant par sa vie de la gratuité de Dieu.

Mais comment faire ?

Repartir de Jésus, un appel à venir à Jésus (v.47), et se découvrir à son contact « pécheur aimé » et « pardonné », tout à la fois enfant prodigue, aimé et pardonné sans condition.

On entre alors dans un chemin où, peu à peu, l’image du Père miséricordieux prend chair en nous, s’incarne en nous, dans le quotidien de nos relations.

Ainsi, nos peurs, nos mécanismes de défense, nos agressivités impulsives ou cultivées « fondent » alors progressivement, faisant place à la douceur et à la bienveillance qui désarment les conflits.

Ainsi nous ne sommes plus encerclés que d’ennemis, mais invités à vivre comme « Fratelli tutti » : « Tous frères » sur un même chemin à la suite du Christ, sachant que la grâce du pardon nous est donnée, même là où il paraissait impossible à vivre !!!

« Je fais la guerre, j’attaque, c’est ainsi que j’essaie de vivre. Mais je fais la guerre à moi-même, pour me désarmer.

Pour lutter efficacement contre la guerre, contre le mal, il faut savoir intérioriser la guerre pour vaincre en soi le mal. Il faut mener la guerre la plus dure, c’est la guerre contre soi-même. Il faut arriver à se désarmer.

J’ai mené cette guerre pendant des années, elle a été terrible.

Mais maintenant je suis désarmé. Je n’ai plus peur de rien, car « l’amour chasse la peur ». Je suis désarmé de la volonté d’avoir raison, de me justifier en disqualifiant les autres. Je ne suis plus sur mes gardes, jalousement crispé sur mes richesses.

J’accueille et je partage. Je ne tiens pas particulièrement à mes idées, à mes projets. Si l’on m’en présente de meilleurs, ou plutôt non, pas meilleurs mais bons, j’accepte sans regrets. J’ai renoncé au comparatif. Ce qui est bon, vrai, réel est toujours pour moi le meilleur.

C’est pourquoi je n’ai plus peur. Quand on n’a plus rien, on n’a plus peur. « Qui nous séparera de l’amour du Christ ? »

                                                               Athénagoras, patriarche de Constantinople (1886-1972)

« Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix. Là où est la haine, que je mette l’amour. Là où est l’offense, que je mette le pardon. Là où est la discorde, que je mette l’union…. Ô Seigneur, que je ne cherche pas tant à être consolé qu’à consoler, à être compris qu’à comprendre, à être aimer qu’à aimer ».

(Saint François d’Assise)

                                                                                                                            Amen

Père Frédéric

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